Séraphin Rehbinder
Mes révérends Pères, Mesdames, Messieurs, mes chers amis,
Pour commencer, je voudrais rappeler que la seule forme d’organisation de l’Eglise en un lieu donné, conforme aux canons, c'est-à-dire à notre foi elle-même, est celle de l’église locale, avec un Primat et un seul évêque dans chaque région. "La Sainte Eglise ne connaît pas d'autre organisation" disait déjà le Métropolite Wladimir, en 1949, dans sa lettre, écrite au nom l'assemblée diocésaine et envoyée à tous les orthodoxes se trouvant en Europe occidentale. Avant d’examiner comment il serait possible de construire l’église locale dans cette partie de l'Europe, je voudrais réfléchir avec vous à ce qu’est, et n’est pas, toute église, sur le plan de son fonctionnement.
Une église n’est pas une monarchie, ou une dictature, dans laquelle le Primat, une fois désigné par ses pairs, serait le chef. Aidé d’un synode, c'est-à-dire d’un organisme composé d’un certain nombre des principaux évêques, qui serait le «gouvernement», il dirigerait son église au travers de «préfets» appelés évêques, placés à la tête de circonscriptions, les diocèses. Une telle description de l'organisation ecclésiale pourrait paraître caricaturale, et pourtant… ces travers existent dans bien des églises autocéphales, cela s’appelle du cléricalisme. C’est une déviation par laquelle les «clercs» s’attribuent tout le «pouvoir» dans une église qui fonctionne comme un Etat.
Ci-après - la saisie de l’enregistrement des discussions qui ont suivi les exposés lors de la Table Ronde du 25 avril 2004.
Les débats étaient modérés par Victor Loupan.
Serge Schmemann
Tout d'abord, je vous remercie de m'avoir invité pour vous parler de notre expérience américaine.
Le week-end dernier, j'ai pris part à une conférence à Londres et notre groupe a débattu de la question suivante : qui sont les Russes - font-ils partie de l'occident ou bien de l'orient? Et j'ai compris que cette question ne se posait pas seulement ici, chez nous, mais également chez eux! qui sommes-nous? A quelle entité appartenons-nous?
Malheureusement je ne détiens pas la réponse. Mais peut-être que quelque chose de notre expérience américaine pourra aider à trouver la réponse.
Je commencerai par un bref rappel historique de l'orthodoxie en Amérique.
Cette histoire commence avec l'arrivée de huit missionnaires venant du monastère de Valamo en 1794. L'Eglise s'implanta peu à peu à travers les Etats Unis, surtout en raison de l'arrivée d'un grand nombre d'immigrants.
Tous désireux de contribuer au rapprochement entre les trois branches de l’Eglise orthodoxe de tradition russe et à la promotion de l’Eglise orthodoxe locale en Europe occidentale, dans l’esprit de l’appel historique lancé le 1er avril 2003 par S.S. Alexis II, patriarche de Moscou et de toutes les Russies, des fidèles des juridictions orthodoxes du patriarcat de Constantinople, du patriarcat de Moscou et de l’Eglise hors frontières se sont réunis en Assemblée générale constituante à Paris, le 31 mars 2004.
A cette occasion, les 25 membres fondateurs ont adopté les statuts de l’association dénommée Orthodoxie Locale de Tradition Russe en Europe occidentale (OLTR), dont l’objet se définit comme suit :
«Cette association a pour objet la promotion de l’Eglise orthodoxe locale en Europe occidentale dans le maintien des traditions spirituelles et cultuelles orthodoxes russes».
Oleg Lavroff
(Oleg Lavroff avait préparé ce texte mais n'avait pu le prononcer, étant absent lors de la Table Ronde. Il avait été remplacé par le père Nicolas Rehbinder)
Eminences, révérends pères, mesdames et messieurs,
Je me suis fixé comme ligne de conduite de rester neutre et objectif et de vous présenter un état des lieux tel que je le perçois depuis que je travaille activement au sein de notre Archevêché. J'ai préparé cet exposé en concertation avec M. Basile de Tiesenhausen que je tiens à remercier.
Séraphin Rehbinder
Eminences, révérends Pères, Mesdames, Messieurs, nous venons d’écouter de très intéressants exposés sur l’histoire et sur la situation actuelle de notre Archevêché. Il est certainement plus hasardeux de parler de son avenir. Mais cet avenir dépend de ce que nous en ferons et les circonstances font que nous sommes obligés de nous pencher sur cet avenir.
Il y a en effet une accumulation de faits qui font que nous pouvons difficilement continuer à vivre tranquillement comme nous le faisions jusqu’à présent. Quels sont ces faits ? Il y a tout d’abord la chute du communisme et du pouvoir totalitaire violemment antireligieux qui régnait en Russie. Et personne n’oublie que nous sommes un diocèse Russe et que notre situation est provisoire. Mais il y a aussi notre enracinement progressif dans nos pays actuels, qui pose à la fois le problème de notre identité : caractère Russe ou non, et de l’organisation, ici en Europe Occidentale, de l’église orthodoxe à laquelle nous appartenons. Et si nous voulions encore fermer les yeux sur les changements qui s’opèrent autour de nous, la lettre récente du Patriarche de Moscou nous interpelle et nous oblige à préciser nos positions.
L'organisation de la table ronde, après les exposés introductifs, prévoyait que des intervenants réagissent en priorité en cinq minutes à ce qui avait été dit avant que la parole ne revienne à l'auditoire dans son ensemble. Le dépassement du temps de parole de certains des premiers en empêcha d'autres de s'exprimer.
Ci-après - la saisie de l’enregistrement des discussions lors de la Table Ronde.
Les débats étaient modérés par Michel Milkovitch.
Archiprêtre Nicolas Rehbinder
Si l'on commence à s'interroger sur l'Archevêché aujourd'hui, on entrevoit un corps ecclésial unifié, jouissant d'une certaine autonomie, et qui recouvre une réalité extrêmement riche et complexe, à propos de laquelle je relèverai trois aspects.
1. Cette entité ecclésiale est riche d'un héritage, qui se décline en un bagage théologique, culturel et humain.
2. L'Archevêché est aujourd'hui un ensemble de paroisses extrêmement diverses, avec à sa tête un Archevêque assisté d'un Conseil diocésain.
3. Il doit enfin relever un certain nombre de défis, que lui pose le développement de l'histoire aujourd'hui.
C'est autour de ces trois thèmes que je voudrais développer mon très court exposé. Les deux premiers sont probablement connus de vous tous, cependant, il est bon d'en rappeler les éléments.